21 heures avant le nouveau visage de la France
Je me sens comme soudainement proche de Chirac. Il est sur le point de quitter sa maison, doublement. Pas évident. Déménager de l'Elysée. Et dire adieu à son propriétaire avec qui il ne s'entendait pas si mal que cela. Se séparer de la France et des Français.
Et puis Chirac a la trouille. Il n'a pas tenu ses promesses, la fracture sociale est toujours d'actualité. L'immunité présidentielle touche à sa fin. Mais ce qu'il redoute le plus, ce n'est pas tant son avenir, ou la possibilité, de plus en plus improbable de voir son ennemi lepéniste franchir comme en 2002 le cap du deuxième tour.
Ce que Jacques Chirac craint, c'est de laisser les clés à un personnage ambivalent, possédé par le désir du pouvoir, un Napoléon à fort potentiel dictatorial, son dauphin légitime, Nicolas Sarkozy. "Diviseur à l'ego surdimensionné" tel que l'a analysé en substance l'actuel ministre de l'Enseignement supérieur, François Goulard.
Jacques Chirac se réveillera demain avec la gueule de bois. Pour que ça passe plus vite. Il priera au petit-déjeuner pour que le parti qu'il a créé soit laminé. Pour que ce ne soit pas la France de Sarko qui gagne. Parce que si Chirac est un voleur, un menteur, c'est aussi un démocrate qui croit en l'indépendance des pouvoirs, en la laïcité. Et un requin qui sait flairer ses congénères les plus dangereux.
Sarkozy raille ses adversaires. Sarkozy insulte ses conseillers, "des connards", injurie des figures de l'Ump qui ont eu la prétention de vouloir concourir à la candidature de la candidature, MAM, "la salope". Et puis Sarko attaque des Français, ces "racailles".
Sarkozy ne veut qu'une chose, se venger, devenir grand, se voir applaudir par 120 millions de mains en délire. Sarko est un rocker, un sportif de haut niveau, un acteur qui marche à l'adrénaline. Si la France garde jusqu'au 6 mai ses esprits, on pourra proposer à Nicolas Sarkozy une reconversion qui lui irait au poil: une adaptation ciné de la bio de Napoléon Ier.